La Musique adoucis les mœurs | PV Jessica

La Musique adoucis les mœurs

Jouer de la musique dans un Pub n’est jamais une chose facile et ce pour au moins deux raisons, d’abord parce que de nombreux patrons de bars ont des oursins dans les poches et refusent de payer les musiciens sous prétexte qu’ils n’ont pas fait venir assez de monde ou tout simplement parce qu’ils devraient se contenter de se produire par « passion », puis parce que bien souvent les clients de l’établissement ne sont pas forcément réceptifs aux mélodies jouées et qu’ils ne leur offrent qu’une oreille distraite, pour ne pas dire totalement désintéressée. Fort heureusement, loin d’être un lapin de six semaines, Carmelo avait appris à éviter ce genre d’emmerdes. Après des dizaines de mésaventures, de mauvaises surprises, le chilien et ses collègues comprirent qu’il fallait faire passer la qualité avant la quantité et qu’il valait mieux ne jouer que dans quelques troquets intéressants et intéressés. Outre ses méthodes de vieux briscard, le beau quadragénaire avait également développé toute une panoplie de techniques pour capter l’attention des habitués et les faire participer aux concerts.

Non vraiment, à ce petit jeu là l’enseignant était vraiment doué, au point même d'acquérir une petite notoriété locale et de devenir un habitué dans quelques bars du centre-ville. Parmi eux le célère Walworth Pub, où il se produisait un ou deux soirs par semaine. Le brun aimait ses petits moments d’évasions qui l’aidaient à oublier ses soucis, son travail, où il pouvait mêler reprises WTF et grands classiques de la musique folk et un public toujours assez réceptif… et motivé à l’idée d’enchaîner avec un karaoké après son concert. Ce jeudi-là il arriva tranquillement une heure avant le début de sa prestation pour faire les balances, quelques réglages et aux alentours de 21 heures il commença à jouer devant une petite quarantaine de personnes. Assis sur un tabouret, sous les lumières verdâtres et donc terriblement irlandaises du Shamrock, il prit quelques secondes pour se recoiffer et esquissa un petit sourire amusé :

« Bonsoir ! Je vais vous servir de Jukebox pour quarante cinq minutes, peut-être une heure si vous aimez bien ma musique… Donc habituellement je joue ici avec mes potes du groupe “Oh… What Ever” mais vu que ces derniers avaient apparemment mieux à faire… je me retrouve seul devant vous ! Bref…  Est-ce que vous vous souvenez de Cascada et de son tube “Everytime we Touch” ? Et bien saviez vous qu’avant de devenir un… mh… classique de l’eurodance, il s’agissait d’une chanson pop-folk interprétée par Maggie Reilly ? Non… bon tant pis… Et bien en tout cas vu que je n’ai qu’une guitare et pas de DJ, c’est cette version que je vais vous interpréter en espérant qu’elle vous fera bouger autant que la reprise…  Vous aurez le droit de chanter le refrain avec moi et de taper des mains… Haha…  »

Sans plus attendre, le latin laissa ses doigts glisser le long des cordes de sa guitare et commença à chanter. Aussitôt, son accent hispanique laissa sa place à une voix plus rocailleuse, aux antipodes des paroles de la chanson qu’il venait de commencer à chanter. Fort heureusement les spectateurs et spectatrices embarquèrent et il enchaîna avec quelques morceaux : Take Me Home Country Road de John Denver, Mrs. Robinson de Simon et Garfunkel, Summer Wine de Nancy Sinatra, Layla d’Eric Clapton et bien d’autres…. Le père célibataire termina finalement son concert avec une chanson d’amour, un autre morceau du grand John Denver nommé Annie's Song  


Habituellement l’ethnologue terminait ses concerts par la chanson “In My Secret Life” du génial Léonard Cohen, mais Aleida l’avait engueulé à ce sujet. Cette chanson parlant d’un homme incapable de dépasser une rupture ne donnait pas forcement une image très reluisante ou du moins séduisante du chanteur, qui une fois son concert terminé, deposé sa guitare contre son tabouret et se dirigea vers le comptoir pour boire un verre en se frottant la barbe avant que le Karaoké ne commence.